samedi 30 juin 2012

L'amour en face




- Bonjour Madame...

- Vous êtes Raoul ?

- Oui.

- Entrez. Asseyez-vous.

Simone ne se retourne pas, elle reste face à la fenêtre, tournant le dos à son interlocuteur. Raoul est assis dans un grand fauteuil, subjugué par la présence de cette femme, son charisme, son élégance, la lumière de sa sensualité, la perfection de sa féminité.

- On m'a dit que vous vouliez me voir ? demande Simone

- En fait, c'est plus que ça, je ne voulais pas simplement vous voir, je vous cherchais.

- Pourquoi me cherchiez-vous ?

- J'ai toujours su que l'amour existait, parce que j'ai toujours cru en lui. Je l'ai cherché, longtemps, puis je vous ai vue. Plusieurs fois. C'était assez pour croire en vous.

- Vous croyez en moi parce que vous m'avez vue ? Mais il faudrait me vivre pour être sûr de ne pas avoir cru en un mirage, vous ne pensez pas ?

- C'est la raison de ma présence ici.

- Personne n'a jamais vu mon vrai visage.

- Avez-vous déjà vu le mien ?

- Non. Imaginez qu'il me plaise. Nous nous aimerions, et ce serait la porte ouverte à toutes les déceptions, toutes les frustrations, la jalousie, la routine, le vent sur les braises, celui qui éteint, pas celui qui attise.

- Mais comment pouvez-vous être si pessimiste ? Retournez-vous Madame, regardez ce qui danse dans mes yeux. Vous vous reconnaîtrez dans mon regard.

- Non. J'ai voulu me donner à un homme un jour. Je lui ai tout donné, ma confiance, mon amour, mes courbes, mes creux, mes biens, mes maux, mon âme...

- Il vous a trompée ?

- Même pas. Ou un peu finalement oui, en ne me rendant pas heureuse autant que le promettaient ses mots. Je n'ai jamais vibré, jamais vraiment frissonné, tout ce que je croyais agréable, tout ce que je ressentais comme plaisant, tout cela n'était que des mensonges que je m'offrais sans prévenir. J'ai aimé sa présence au début, j'ai pensé adorer sa peau, j'ai cru en notre éternité, mais très vite, je me suis sentie lasse.

- Et vous êtes partie ?

- Non, je l'ai laissé partir. Il est parti sans laisser d'ivresse.

- Simone... Je sais, c'est fou... Mais cet homme qui n'a pas su vous trouver, n'a fait que protéger un écrin qu'il n'a jamais ouvert. Laissez-moi vous montrer la force de votre éclat dans mes yeux, laissez mes mains jouer sur vous et écoutez notre symphonie, goûtez à notre alchimie, croyez en l'éternité d'un lien après avoir osé mes lèvres, l'amour n'est pas mort, Simone, jamais, il dort. Réveillez-vous avec moi.


Simone écrasa sa cigarette. Elle regarda dehors, pensive, pendant de longues secondes. Au moment où elle décida de se retourner, elle sentit la main de Raoul dans son cou, lui relevant doucement les cheveux. La douceur et l'attention de cette main l'avaient déjà convaincue. C'était la main qu'elle attendait, celle qu'il lui tendait. Elle se leva doucement, se retourna, trouva les yeux de cet homme qui croyait en elle, elle y vit tout son bonheur à venir. Ils s'embrassèrent. Un baiser qui contenait tous les mots du monde, tous les frissons de la planète, toutes les couleurs de la palette. Un baiser si bouleversant qu'il venait probablement d'inventer de nouvelles couleurs. Raoul était venu chercher l'amour, parce qu'il croyait en lui. Il est reparti avec la plus belle preuve de son existence. Elle s'appelle Simone.




Franck Pelé - Juin 2012 - Textes déposés



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire