lundi 26 septembre 2011

L'effet papillon


- Je crois que j'attendais ce moment depuis plusieurs vies... C'est drôle, on a l'impression de tout avoir pour être heureuse, et puis on fait une rencontre qui vous apporte des réponses à des questions qui n'avaient jamais fleuri...

- Je ressens exactement la même chose Simone... T'embrasser dans l'herbe pendant des heures, regarder cette nature que tu sublimes, sentir le soleil se coucher sur toi et ne pas en être jaloux, ressentir la puissance de cet amour dans tout ton être, savoir qu'il ne peut s'exprimer que pour un seul homme, et avoir la sensation d'être celui-là, c'est la définition la plus sensuelle possible de l'amour...

- Ce n'est pas une sensation. Tu es celui-là Raoul. Je le sais. Je le sais dans mon corps, dans mon cœur, dans mon âme.

- Et pourquoi ne serais-je pas la personnification de ton idéal absolu ? Une espèce de projection de tout ce dont tu rêves, ce mythe impalpable sur lequel viennent se fracasser les vagues à l'âme depuis des siècles, ce mur à peine érodé par tant de sel quotidien... Tu m'aimerais, puis tu te rendrais compte que je suis comme les autres, et de l'écume de tes nuits, je deviendrais l'enclume de tes jours...

- Mais parce que je le sais ! J'avais tout ce que je voulais, et tous ceux que je voulais ! Soudain, l'été dernier, tu es entré dans ma vie. A la seconde où je t'ai rencontré, tous les sommets de mon existence sont devenus dérisoires, parce que tu es devenu mon Everest, celui sur lequel je veux fondre, à chaque saison ! Je veux dans ta vallée pouvoir boire l'éternité de mes neiges et être fière d'être celle qui a fait couler ce torrent d'amour ! Tu es MA réponse. C'est déjà dans l'Histoire ! Comme Christophe Colomb qui découvre l'Amérique. Tu l'imagines en arrivant : "Oh, c'est beau... Oui mais... Et si c'était un mythe impalpable... Faisons demi-tour ! Je n'ai pas confiance..."

- Oh non quand même... Il n'aurait pas fait tout ce voyage pour rien...

- Je suis ton Amérique Raoul, la résolution de ton mystère le plus absolu, ton destin, ta force, ton histoire. Et excuse-moi mais moi le mythe, quand je le rencontre, je le palpe !

- Pardonne-moi de partager ces doutes avec toi... Tu sais, à la seconde où j'ai croisé ton regard, à ce concert avec ta sœur et Charles, j'ai senti une peur immense, une peur qui a vaincu toutes les autres, je n'en avais plus qu'une, te perdre. Je venais de rencontrer l'élégance et le charme dans une seule femme. Mon idéal. LA femme absolue. Je veux vivre toutes tes couleurs, tous tes parfums, tous tes mots. Je veux te regarder dans les cieux et voir danser des constellations de passion sereine et de douceurs complices, un bonheur sans cesse partagé, je veux sentir toutes mes questions épousées par tes réponses. Pendant le concert, je n'ai pas perdu une miette de tes gestes, de ces regards que tu t'interdisais mais qui dessinaient des sourires pleins de tes intentions secrètes. Jamais je n'ai ressenti la force des violons aussi profondément en moi...

- Arrête tes violons Raoul... Et viens m'embrasser... J'ai tellement de papillons dans le ventre qu'il leur faudrait une branche pour se poser...

- C'est une métaphore ?

- Mais pas du tout ! Allons chercher du bois tiens ! J'ai toujours rêvé qu'on me chasse les papillons à coup de bûche !

- Voilà ! Tu vois ! Je pose juste une question pour être sûr et toi tu fais exploser cette extraordinaire dimension romantique jamais explorée par un couple avant nous en trempant ton ironie dans une acidité des plus réalistes ! Tu vois bien que notre couple ne sera pas plus exceptionnel qu'un autre !

- Tu poses une question pour être sûr ??? Mais ça fait une heure que je te dis que tu es MA réponse absolue, que je suis ton Amérique, ton idéal, que je suis faite pour toi, que tu fais danser mille papillons dans mon ventre, qu'est-ce qu'il te faut de plus ? Tu veux que je t'envoie un bristol ???

- Et pourquoi pas ?!!

- Tiens, bah tu vas écrire ton adresse à l'intérieur de cette cuisse, là...

- Mais... Pourquoi tu veux que j'écrive mon adresse ici ?

- Bah comme ça, tu seras sûr que personne d'autre que toi ne viendra emménager, il verra que c'est habité, et puis avec un peu de chances, si tu t'appliques bien, tu verras peut-être l'effet papillon dans la marge !


Simone avait beau faire parler le feu, elle fondait d'amour pour son Raoul. Pendant qu'il écrivait lentement son adresse à l'intérieur de sa cuisse, il entendait le cœur de Simone battre avec une force phénoménale.

A cet instant précis, tous ses doutes s'envolèrent dans un battement d'elle...



© Franck Pelé - Septembre 2011



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